La condescendance divine, bien-aimés, a rendu pour moi ce jour digne d'honneur, elle qui, élevant ma bassesse jusqu'au rang le plus élevé, a montré qu’elle ne méprisait aucun des siens. Aussi, même s'il est inévitable de trembler quand on considère son mérite, il est bon et religieux de se réjouir quand on considère le don reçu ; celui, en effet, de qui me vient cet honneur est aussi celui qui m'aide à faire face à ses obligations; pour que le faible ne succombe pas sous la grandeur de la grâce, il donnera la force, lui qui a conféré la dignité.
Aussi l'anniversaire du jour où le Seigneur a voulu que je commence à remplir la fonction épiscopale est pour moi, lorsqu'il revient, une vraie raison de me réjouir pour la gloire de Dieu, car celui-ci m'a beaucoup pardonné pour que je puisse beaucoup l'aimer; et, pour rendre sa grâce admirable, il a accordé ses dons à quelqu'un en qui il n'a pas trouvé de mérites qui les justifient. Par cette œuvre qui est son œuvre, qu'est-ce que le Seigneur enseigne à nos coeurs ou que veut-il mettre en lumière, sinon que personne ne doit présumer de sa propre justice ni personne douter de sa miséricorde à lui, car celle-ci apparaît avec plus d'évidence quand est justifié le pécheur et relevé celui qui gisait à terre ? Ce n'est pas, en effet, de la qualité de nos œuvres que dépend la mesure des dons célestes et, en ce siècle où toute la vie est tentation, ce que chacun reçoit n'est pas ce qu'il mérite de recevoir ; car, si le Seigneur tenait compte de nos fautes, personne ne soutiendrait son jugement.
Saint Léon Ier, dit le Grand (pape de 440 à 461), Second Sermon pour sa consécration comme évêque de Rome. Saint Léon était un ami du moine marseillais Jean Cassien.